« Mes clients m’ont aidé à replanter mes melons »

« Cela faisait des années que nous n’avions pas connu un gel aussi sévère. Le 19 avril 2024, les températures sont descendues en dessous des 3 degrés dans notre secteur. La veille, nous avions mis en terre 10 000 pieds de melon : tous ont été détruits, raconte Elie Richaud, maraîcher dans les Alpes-de-Haute-Provence. Les 6 000, implantés la semaine précédente, ont eux aussi été touchés à 50 %. Soit plus de 80 % de perte, sur 9 hectares. En melons, nous échelonnons les plantations pour avoir des fruits durant toute la saison. Ces plantations, décimées par le gel, devaient être récoltées au début de juillet, au plus fort de la demande. Elles sont réalisées mécaniquement. Derrière le tracteur, une machine déroule un film plastique au sol, qui est percé au moment de la pose. Le plant est déposé à cet endroit. »

« Après le gel, nous allions devoir tout faire à la main à cause de la présence du plastique : arracher les plants morts, et en réintroduire de nouveaux, se désole Elie Richaud. Trop coûteux en main-d’œuvre, et quasi impossible à cette période de l’année. Car c’est l’époque où tous les chantiers de plantation s’enchaînent. Après les melons, il y a les courges et les potimarrons, puis les fraises, les tomates… Nous vendons en circuit court auprès d’une centaine de clients fidèles. »

12 000 pieds ont été replantés en trois heures

« Face à l’urgence, j’ai décidé de leur envoyer un SMS. Je leur ai demandé de nous aider à réimplanter la culture. Une journaliste de France 3 Méditerranée se trouve dans notre fichier, explique le maraîcher. Elle a relayé notre histoire à la télé. D’autres médias s’en sont emparés. Il y a eu des reportages. Si bien qu’en plus de mes clients, beaucoup d’autres gens m’ont contacté. Le 27 avril, une cinquantaine de personnes, de tous horizons, sont venues nous prêter main-forte. Nous les avons accueillis avec un petit-déjeuner, puis nous sommes allés sur la parcelle. »

« En trois heures, 12 000 pieds ont été replantés, se félicite Elie Richaud. La veille, nous avions préparé le chantier pour simplifier le travail. Nous avions arrosé les terres pour faciliter l’implantation et avions déposé les plants devant chaque rangée. Il suffisait donc d’effectuer un trou dans le plastique, de retirer l’ancien plant et de déposer le nouveau. Le taux de reprise a été de 85 % ! Je garde de cette journée un souvenir formidable, ce fut un véritable élan de solidarité ! Il y a eu de nombreux échanges sur notre travail, et surtout sur le changement climatique et ses conséquences sur l’agriculture. Des gens ont demandé qu’on leur envoie des photos montrant la croissance des plantes. Des personnes qui n’étaient pas clientes le sont devenues. »